Les Femmes Girafes Padaung Karen
A l’ouest de Chiang Mai, dans la petite ville de Mae Hong Son, dans le triangle d’or et à la frontière birmane, une des nombreuses minorités ethniques qui composent les tribus des collines est progressivement sortie de l’ombre grâce, ou à cause, de celles qu’on nomme les femmes girafes. Elle s’érige aujourd’hui en véritable porte étendard de la diversité et de la préservation des us et coutumes des peuples qui refusent de faire fi de leur mode de vie traditionnel, en dépit des influences exogènes de plus en plus insistantes. Si la tribu Padaung Karen intrigue, c’est qu’elle affiche une spécificité culturelle tout à fait remarquable : ses femmes perpétuent une ancienne tradition qui consiste à allonger leur cou en portant de multiples anneaux à un âge parfois très précoce. Explications…
Les femmes au long cou: des anneaux pour … l’autosuffisance économique
Aujourd’hui, les Padaung, également connus sous le nom de Kayan, entament leur 26e année dans les camps de réfugiés, en Thaïlande, à la frontière avec une Birmanie qu’ils ont fui à la suite de la persécution de la junte militaire, qui refusait que ces « femmes au long-cou salissent l’image » du pays. S’ils ont longtemps souffert de la marginalisation et d’une pauvreté extrême, à l’image des autres tribus qui se sont réfugiées dans les hauteurs du Nord thaïlandais fuyant les conflits armés et les persécutions, les Padaung affichent aujourd’hui une autosuffisance économique surprenante.
En effet, l’engouement des touristes pour les femmes Padaung depuis le début du millénaire s’est traduit par des entrées financières importantes. Ainsi, les Padaung ne sont plus dépendants de la clémence de la météo ou des aides financières externes.
Femme Girafe: Une pratique courante… non dénuée de dangers
Un soir de pleine lune, en présence de sa famille et des notables de la tribu, une fillette de 5 ans reçoit sa première spirale dorée, sous l’autorité du shaman du village, après avoir enduit son cou d’une pommade préparée à base de graisse de chien, de lait de coco et de gelée royale: la modification corporelle menant a son statut de femme au long cou commence alors.
Cette scène profondément intrigante pour les occidentaux est pourtant confondante de banalité dans les villages Padaung.
Tous les 2 ou 3 ans, la spirale métallique est substituée par une autre, plus longue, plus large mais aussi plus lourde, jusqu’à atteindre une dimension maximale de 40 centimètres et un poids de 10 kg. Cette « prouesse » est rendue possible par la disposition particulière des anneaux, qui reposent non pas sur les os du cou, mais sur les vertèbres et les côtes de la femme girafe.
Si la position des vertèbres reste le plus souvent intacte, les côtes sont quasi-inévitablement atteintes, et peuvent parfois pencher vers le bas d’un angle de 45°. Notons toutefois que ces conséquences sont toujours sujettes à débat.
Signe de beauté ou source de revenu ?
Bien que de nombreuses hypothèses aient été émises par les historiens et les ethnologues, les motivations qui sous-tendent cette pratique ancienne restent encore inconnues à ce jour.
Certains avancent que le « long cou » est un signe de beauté pour les Padaung, d’autres y voient une volonté de protéger les Padaung contre les morsures de tigres, autrefois très présents dans cette région du nord de la Thaïlande. Enfin, une théorie plus fantaisiste fait état de la volonté des femmes à rassembler aux dragons de la mythologie Padaung.
Toutefois, nombreux sont qui estiment que si cette pratique perdure, c’est qu’elle s’est peu à peu imposée comme la principale source de revenu de la tribu, soulevant par là-même des interrogations quant à l’éventuelle exploitation des femmes girafes pour des considérations purement pécuniaires.
Pour observer ces femmes, parfois réduites à l’état de curiosités ambulantes, les touristes déboursent l’équivalent de 6 euros afin de les approcher et de les photographier. En période de haute saison, les femmes girafes défilent quotidiennement devant une centaine de touristes.
Et si elles retirent leurs anneaux ?
Contrairement à la croyance populaire, véhiculée par des agences touristiques locales pour appuyer le capital dépaysement de la région, les femmes girafes peuvent parfaitement retirer leur collier sans craindre de mourir. Les anneaux entraînent pas la dislocation du cou ou la suffocation, mais leur port continu, outre ses effets supposés sur les vertèbres, causerait un affaiblissement des muscles de cette partie du corps.
Il est rare que nous portions un jugement sur des activités et nous allons essayer ici d’éviter les polémiques. Malgré tout, nous conseillons vivement à tous les voyageurs allant voir les femmes girafes de soit acheter sur place des produits de la tribu (même s’ils ne vous plaisent pas forcement) ou bien carrément de donner de l’argent aux autochtones de manière subtile. Sachez que sur la somme que vous payez aux tours operators, une infime partie (pour me pas dire quasiment rien) est redistribué aux Padaung Karens.
Sans rentrer dans le débat de l’exploitation humaine, il nous semble particulièrement important que vous compreniez ce point si vous avez lu jusqu’ici, et agir en conséquence si cela vous semble adéquat.