La Tribu Hmong: Une Histoire Tumultueuse
Les Hmongs est une des tribus du nord de la Thaïlande les plus emblématiques. Fuyant les troubles politiques et la violence que leur a longtemps réservée la dynastie Qing dans leur Chine natale, les Hmongs ont entamé une longue migration dès le 18e siècle, qui les mènera au d’abord au Vietnam.
Alors qu’ils aspiraient à mener une vie paisible dans les hauteurs de cette partie du monde, la tribu Hmong sera embarquée dans certains des conflits armés les plus sanglants de l’Histoire. Sollicités par la France et les Etats-Unis en échange de leur protection, ils combattront ainsi les armées vietnamiennes et laotiennes lors des deux guerres d’Indochine.
Après la fin des hostilités, des centaines de milliers de Hmongs demanderont l’asile politique en Thaïlande, où ils se grefferont aux « tribus des collines », tandis qu’une minorité trouvera refuge en Occident, principalement dans la ville de Merced en Californie, mais également en Australie, en France, en Guyane française, au Canada et en Argentine…
Les Sous Groupes du Peuple Hmong
Au regard de leur implantation géographiquement hétérogène et des nombreux sous-groupes ethniques qui les composent, les Hmongs sont désignés sous différentes appellations.
Ceux qui ont élu domicile dans les hauteurs laotiennes sont connus sous le nom de Hmoob Dub (Hmongs noirs), Hmoob Twaij (Hmongs rayés), Hmoob Dawb (Hmongs blancs) ou encore Moob Leeg (Hmongs verts), en référence aux broderies multicolores qu’ils arborent sur leurs différents artefacts.
En Thaïlande, où les Hmongs ont migré à l’issue de la guerre civile laotienne qui a vu le Pathet Lao étendre sa domination sur le pays à la fin des années 1970, certains ont fui vers des camps de réfugiés à la frontière, d’autres ont élu domicile dans les régions montagneuses, pour devenir une des principales composantes de ce que les Thaïlandais appellent aujourd’hui les « tribus des collines ».
En Chine, le terme « Miao » fait référence à une des 55 minorités officielles reconnues par l’Etat, forte d’une population de quelque 10 millions qui inclut des Hmongs, mais aussi des Hmu, des Kho Wiong et des A Hmao.
Origine et histoire contemporaine des Hmongs
Si l’origine des Akhas reste sujette à plusieurs approximations, celle des Hmongs a été scientifiquement prouvée par une analyse d’ADN mitochondrial. Bien qu’ils se revendiquent de la région centrale du fleuve jaune, les Hmongs seraient en réalité originaire de l’extrême sud de la Chine. Ils auraient ainsi occupé cette région depuis au moins 2 000 ans. Ce postulat est d’ailleurs appuyé par des similitudes linguistiques qui subsistent encore aujourd’hui avec certaines tribus chinoises de cette région.
Les Hmongs Au Vietnam
Le Vietnam a probablement été le premier pays à accueillir les Hmongs qui migraient de la Chine voisine. Leur présence y est attestée par des écrits à la fin du 18e siècle. Lors de la colonisation du Vietnam du Nord, entre 1883 et 1954, de nombreux Hmongs ont décidé de rallier les nationalistes vietnamiens et les armées communistes, tandis que les Hmong christianisés rejoindront l’armée française. A l’issue de la guerre qui verra la victoire du clan des nationalistes du Viet Minh, les Hmongs pro-français seront contraints à l’exile au Laos et au Vietnam du Sud. Aujourd’hui, on dénombre environ 1.1 million de Hmongs au Vietnam, qui se concentrent dans les régions montagneuses au nord.
Les Hmongs Au Laos
Au début des années 1960, en réponse à l’invasion du Laos par les troupes nord-vietnamiennes, la division des opérations spéciales de la CIA lancera un vaste plan de recrutement et d’entraînement des Hmongs, qui constitueront par la suite « l’Armée Secrète ». Bien que leur rôle dans la neutralisation de l’armée communiste ait longtemps été gardé secret, de nombreux officiers américains ont ultérieurement remercié le peuple hmong pour « ses sacrifices en faveur des Etats-Unis ». Après le retrait des troupes américaines et la suspension de l’aide de la CIA aux nationalistes au début de l’année 1973, les communistes du Pathet Lao s’empareront progressivement du pouvoir, reléguant les Hmongs pro-américains dans la jungle, où ils tentent encore aujourd’hui de survivre.
Les Hmongs En Thaïlande
Le premier flot des migrants Hmongs est arrivé en Thaïlande au début de la guerre du Laos. A l’issue du conflit et suite à la victoire des communistes, les Hmongs pro-américains trouveront refuge en Thaïlande, notamment dans le célèbre temple Wat Tham Krabok. Certains ont élu domicile dans les zones montagneuses au nord du pays, et font désormais partie intégrante de ce que les Thaïlandais appellent les « tribus des collines ».
Les Hmongs dans le reste du monde
Outre leur Chine natale, le Vietnam, la Thaïlande et le Laos où ils ont trouvé refuge à diverses périodes de l’histoire contemporaine, les Hmongs sont présents en Europe, notamment en France avec une communauté de 17 000 personnes (dont 2 000 en Guyane française), en Australie (2 200), au Canada (moins de 1 000) et surtout aux Etats-Unis (260 000) où ils ont immigré en aval de la guerre laotienne. La population totale des Hmongs est estimée aujourd’hui à 5 millions.
Langues et culture de la tribu Hmong
Bien qu’ils aient pratiqué une langue commune au 18e siècle, les Hmongs ont peu à peu délaissé leur héritage linguistique en raison des flux migratoires répétées. Aujourd’hui, les Hmongs communiquent par le biais des langues de leur environnement immédiat, comme le chinois de la province de Yunnan, le laotien ou encore le thaï du Nord. Deux tribus Hmongs de deux pays différents peuvent toutefois communiquer par le biais de leur langue d’origine, en passant par les chefs de clan qui s’efforcent de préserver les coutumes et les traditions de leur peuple. Aucun système d’alphabet ou de phonétique n’a été mis en place pour véhiculer la langue hmong.
En Thaïlande, où la situation des Hmongs est diamétralement opposée à celle des Hmongs laotiens, le gouvernement encourage les jeunes à se scolariser et à s’insérer dans la dynamique de démarginalisation des minorités. Si ces initiatives se sont soldées par une amélioration drastique de la qualité de vie des Hmongs, elles ont également sonné le glas de la langue Hmong et de plusieurs aspects de la tradition de ce peuple des collines.
L’habit traditionnel des hommes consiste en une chemise à base de feutre léger, dont les manches dépassent les poignets de quelques centimètres. Le corps de la chemise descend au-dessous de la ceinture et est surplombé par deux languettes en tissu qui se croisent. L’arrière de la chemise est le plus souvent embelli par des broderies élaborées. Les femmes adoptent un style vestimentaire comparable à celui des hommes, et enroulent leurs cheveux dans un chignon frontal, qu’elles dissimulent sous un couvre-chef noir brodé en blanc.
Mode de vie et croyances
Les Hmongs de Thaïlande construisent généralement eux-mêmes leur maison, au sommet d’une colline, à base de bambou vert pour les murs et de feuilles de palmier pour le toit. Ces habitations sont dépourvues de fenêtres, en raison du climat froid qui sévit le plus clair de l’année. Certaines maisons disposent d’un mortier pour battre le riz et d’une meule pour moudre les grains. Les Hmongs accordent une grande importance aux croyances ancestrales, même dans la construction de leur maison. Pour décider de l’endroit où la construction prendra forme, ils disposent des grains de riz dans un bol en fonction du nombre des membres de la famille et des animaux qu’ils possèdent. Si le bol reste intact après une nuit, la parcelle de terrain est considérée comme apte à accueillir la maison familiale. Cette pratique est encore très présente parmi les Hmongs de Thaïlande.