La Tribu Padaung Karen
La fin des années 1980 marquera un tournant de la répression qu’exerçait la junte militaire birmane sur les minorités ethniques. Bien qu’ils se soient probablement établis à Demawso, dans l’Etat birman de Kayah, dès 739 avant Jésus-Christ, les Kayans n’ont pas été épargnés et se sont vus contraints de fuir vers la province de Mae Hong Son en Thaïlande voisine, où ils deviendront progressivement une communauté autosuffisante grâce aux revenus du tourisme, « ethnique » pour certains, « culturel » pour d’autres…
Kayan ou Padaung ?
Les Padaung Kayan, aussi connus sous le nom de Kayan Lahwi, sont un sous-groupe des Karen rouges, une minorité ethnique tibéto-birmane qui réside principalement en Birmanie. « Padaung » est un terme de la langue shan, dont les locuteurs se trouvent dans l’Etat éponyme en Birmanie, dans quelques régions de l’Etat de Kachin, mais aussi dans le nord de la Thaïlande du fait des différents mouvements migratoires.
Il désigne le sous-groupe des Kayan Lahwi, aujourd’hui célèbre pour ses femmes girafes. Si la littérature a largement adopté ce terme, les Kayan qui résident dans la province de Mae Hong Son le contestent et revendiquent l’appellation « Kayan », bien qu’elle prête à confusion avec le groupe générique. Les ethnologues estiment la population totale des Kayan à 130 000, dont 600 en Thaïlande, principalement de la tribu Padaung.
Distribution géographique
La majorité des Padaung Kayan se sont réfugiés en Thaïlande en provenance de Rwan Khu, un des neuf villages de l’Etat Karen en Birmanie. La province de Mae Hong Son abrite trois villages Padaung Karen :
- Huay Pu Keng, le plus peuplé, est situé sur les rives de la Paï, à proximité de la frontière birmano-thaïlandaise ;
- Huai Seau Tao est un village commercial inauguré en 1995, aujourd’hui intégré dans la majorité des circuits touristiques pour l’ « observation » des femmes girafes ;
- Nai Soi Kayan Tayar, localement appelé « Nai Soi », se situe à proximité du camp de réfugiés des Karen.
Croyances religieuses
A l’image des autres peuples des collines, les Padaung Karen placent la spiritualité au centre leur mode de vie et tentent tant bien que mal de préserver leurs croyances traditionnelles. La religion des Padaung Karen est le Kan Khwan, dont l’origine remonterait à l’Âge du Bronze, au moment où les Padaung migraient hors de leur Mongolie supposée natale. La tradition attribue l’origine du peuple Padaung à une union entre une dragonne et un hybride ange/humain.
Kay Htein Bo est la cérémonie religieuse la plus importante de la tribu Padaung. Elle commémore la création de l’univers par le « Dieu créateur », et est ponctuée par des rites de vénération pour remercier le « Dieu éternel » pour sa bénédiction, demander le Pardon et prier pour la pluie. La cérémonie est également l’occasion pour les Padaung des trois villages de se réunir et de préserver la solidarité de la tribu. Le Kay Htein Bo, qui a lieu annuellement à la fin du mois de mars ou au début du mois d’avril, est marqué par des rites de voyance basés sur les os de poulet pour prédire l’année agricole en perspective.
Les Kayan de Mae Hong Son pratiquent également la pronostication par les os de volaille à l’occasion des « cérémonies de purification », qui sont organisées à la demande des familles qui rencontrent la malchance et l’infortune.
Si ces croyances traditionnelles ont toujours pignon sur rue à Mae Hong Son, la majorité des Padaung sont aujourd’hui des catholiques romains. En effet, les missionnaires italiens qui se sont établis en Birmanie au 19e siècle ont travaillé pendant des nombreuses années avec la tribu Padaung. Dans son ouvrage « Les récits, croyances et coutumes du peuple Kayan, Mar Hong Son : Littérature Kayan et comité culturel », Eden Phan avance que sur les 306 villages Kayan, 209 sont catholiques romains, 44 sont bouddhistes, 32 sont baptistes et 19 pratiquent la religion traditionnelle Kan Khwan.
Les femmes girafes
Les femmes des tribus Padaung, surnommées “femmes girafes” ou “femmes au long cou” se sont progressivement imposées comme la principale attraction touristique du peuple des collines. Célèbres pour les anneaux dorés qu’elles arborent depuis leur plus jeune âge, elles attirent les touristes qui viennent observer leur cou allongé par le port prolongé de ces artefacts. Si certains arguent que cette pratique a permis à ce peuple initialement marginalisé et pauvre de réaliser son autosuffisance économique, d’aucuns déplorent l’exploitation des femmes Padaung, qui sont parfois contraintes de défiler quotidiennement devant des centaines de touristes…